Avr 222015
 

Trois jeunes femmes se sont enchaînées aux installations de la raffinerie Suncor, le 7 octobre 2014, pour s’opposer au projet d’inversion de la ligne 9B d’Enbridge, destiné à acheminer du pétrole albertain vers l’Est. Cet acte remarqué est l’un des nombreux moyens employés par les citoyens pour faire pression sur les gouvernements. Austérité, hausse des tarifications, exploitation des ressources naturelles, développement énergies fossiles, ces politiques publiques et bien d’autres ont en commun de placer les intérêts de l’industrie avant celui des citoyens, le capital avant l’humain. Et pourtant, ce sont les communautés humaines qui en subissent les impacts pendant que l’industrie s’enrichit. Que faire quand l’État, «bon père de famille» qui devrait nous représenter et nous protéger, au contraire nous fait violence? C’est la question que se posent un nombre grandissant de personnes. Plusieurs se tournent vers la désobéissance civile.

Il n'est pas surprenant que l'intérêt des citoyens soit mal représenté par ce système «démocratiquement infect», comme le disait le premier ministre René Lévesque. En 1976, lors de son arrivée au pouvoir, le Parti québécois avait prévu une dizaine de réformes en profondeur qui auraient pu faire du parlementarisme britannique un réel système démocratique. Seule la moitié de ce programme a été mise en œuvre, laissant sur la glace les principales réformes: initiative populaire, élection du chef d'État au suffrage universel, décentralisation des pouvoirs, scrutin proportionnel et élections à date fixe.

L'illusion démocratique

En 2003, les États généraux sur la réforme des institutions démocratiques, présidés par Claude Béland à l'initiative du gouvernement Landry, ont réaffirmé l'urgente nécessité de ces réformes et le consensus écrasant en faveur de celles-ci. Le Rapport Béland a été relégué aux oubliettes par tous les gouvernements qui se sont succédés depuis.

Impossible, semble-t-il, de convaincre les élus de changer le système qui les a portés au pouvoir. Des citoyens, autour de Roméo Bouchard et de l'auteur de ces lignes, créent un parti destiné à prendre le pouvoir pour déclencher une Assemblée constituante et poser les bases d'une vraie démocratie. La Coalition pour la constituante intéresse des milliers de personnes à travers le Québec, mais ne récolte guère de suffrages, faute de capitaux nécessaires à la promotion à grande échelle et de la couverture médiatique qui détermine bien souvent l'issue du scrutin.

Les médias sont sous le contrôle d'une poignée de conglomérats qui, selon l'expression de Noam Chomsky, professeur au MIT, établissent l'agenda politique («agenda setting») en fonction des intérêts de la classe financière. C'est ce qui fait dire à Hervé Kempf, journaliste et auteur français, que notre soit disant démocratie est une illusion qui permet à une oligarchie d'exercer le pouvoir réel.

Notre démocratie a-t-elle été détournée au profit des plus riches? C'est ce que croit l'auteur et polémiste Victor-Lévy Beaulieu, qui signait en 2013 Désobéissez!. «Nos institutions dites démocratiques ne sont plus que des caricatures et ne se réformeront pas d'elles-mêmes», résume-t-il en lançant un vif appel à la désobéissance civile.

Au moment d'écrire ces lignes, le projet de loi fédérale C-51 menace de criminaliser les groupes citoyens et les moyens de pression qu'ils utilisent. Placées au pied du mur, les populations se tournent vers le moyen ultime. Michel Chartrand et Henri-David Thoreau avant-lui ne disaient-ils pas que quand l'injustice est loi, «la place de l'honnête homme est en prison»?

Désobéir pacifiquement

Quelle est cette désobéissance civile à laquelle les peuples sont conviés par la faillite de leurs institutions démocratiques? Les médias de masse l'assimilent souvent, à tort, à des actes de vandalisme ou de violence, à l'opposé des principes mis en place en 1906 en Afrique-du-Sud par Gandhi. «La désobéissance civile, disait-il, pour être civile, elle doit être non violente.»

«La désobéissance civile demeure d'abord non militaire, dans ce sens-là elle est civile, et civile dans le sens de civilité, c'est-à-dire qu'elle continue d'adhérer aux principes de base que la vie en société repose sur des règles», précise le militant Philippe Duhamel, qui organise des formations en désobéissance civile partout au Québec et déploie l'initiative Schiste 911 depuis quatre ans. «C'est justement parce que la loi est un outil essentiel que la décision d'enfreindre la loi est prise avec la plus grande conscience, la plus grande considération.»

Puisqu'elle est une infraction à la loi, la désobéissance civile est paradoxalement définie par les gouvernants. «Un geste qui la veille peut être parfaitement légal, comme par exemple manifester à 50 personnes sans devoir annoncer un itinéraire, illustre Philippe Duhamel, peut le lendemain matin, sous le coup d'une loi spéciale, devenir un acte de désobéissance civile.»

Selon M. Duhamel, un acte de désobéissance civile doit aussi être «commis en toute conscience pour des raisons ressenties comme profondément morales», et par une personne qui «désobéit publiquement à une loi et qui en assume les responsabilités». Un acte de désobéissance civile efficace doit être un acte planifié, fondé, public et assumé.

Il déplore que les actions ne soient souvent pas assumées jusqu'au bout. «L'étape cruciale où les gens qui, étant intimés de se retirer, refusent» est souvent évitée. «Ce qu'on a vu le plus souvent, c'est que la police arrive, il y a un temps de négociation et les gens partent.» Après les arrestations de masse du mouvement étudiant de 2012, il fait remarquer que la mobilisation entourant les procès a eu pour objectif de faire acquitter les accusés. «Dans la tradition de la désobéissance civile on va plutôt dire "je l'ai fait, et voici pourquoi"».

Un équilibre fragile

La réalité décrite par Simon Van Vliet, journaliste multimédia et artiste social qui a été poursuivi en vertu du règlement P-6, est plus complexe. «La judiciarisation de la dissidence qu'on observe depuis quelques années transporte de force la désobéissance civile de la rue aux tribunaux. Des milliers de personnes ont malgré tout choisi de défier les lois et règlements liberticides, au risque de s'exposer à des poursuites pénales souvent kafkaïennes. La lutte qui commence dans la rue se poursuit ainsi devant les tribunaux. C'est pourquoi plusieurs militants et militantes ont choisi de se servir des tribunaux non seulement pour se défendre, mais aussi pour contre-attaquer. Le but des ces militantes et des militants n'est pas tant d'être innocentés que de faire invalider les lois injustes qui permettent de maintenir un ordre illégitime.»

La contre-attaque s'est organisée à Montréal, notamment à l'initiative de personnes touchées par la judiciarisation, dont le militant Jaggi Singh. Leur clinique juridique décrit son approche dans le site outrageautribunal.net: «Notre but est de participer à la construction d’un rapport de force vis-à-vis du système judiciaire qui ne sera pas conjoncturel.»

Si la démocratie est une illusion, l'égalité face au système judiciaire l'est plus encore. Selon une personne engagée qui a préféré garder l'anonymat, s'exposer à la loi n'est pas à la portée de tous: «La désobéissance civile impliquant des arrestations quasi-volontaires s'assied sur des privilèges: les analyses de privilèges doivent être intégrées dans les cercles qui la pratiquent. Je jouis de nombreux privilèges, que je peux mettre au service des luttes de différentes façons, mais je suis consciente que certaines personnes n'ont pas ce choix. La vie et l'intégrité des personnes est très inégalement reconnue dans ce pays, et de par le monde.» Par ailleurs, souligne cette personne, la judiciarisation implique aussi «des enjeux de sécurité et de perte de libertés, donc de pouvoir d'action.»

C'est surtout le besoin d'efficacité qui a poussé Marc Fafard, militant de la Côte-Nord, à choisir la désobéissance civile. «Dans l'urgence, dit-il, le message devait être fort et immédiat.» Lors du blocus de la route 138 par les Innus contre le projet de Mine-Arnaud, illustre-t-il, «le message s'adressait au gouvernement du Québec. Ce dossier national imposait le choix d'une action à portée nationale». M. Fafard affirme que si les manifestations sans permis lors de visite de ministres lui ont rarement valu des rencontres avec ministres, il a «toujours eu une couverture médiatique comparable à celle de l'invité».

C'est toutefois un fragile équilibre, selon lui. «Les médias et l'autre gang vont dire que vous êtes des bandits. Cela peut démolir une réputation en un rien de temps, en plus de détourner l'attention de l'enjeu. Le respect populaire est primordial mais fragile. La personne devrait s'effacer devant la lutte collective, mais la loi vise les personnes, et il est difficile d'agir en groupe ou en cause quand on pose des actes illégaux.»

Pour Alyssa Symons-Belanger, une des trois militantes qui se sont enchaînées aux installations de Suncor l'automne dernier, la solution est dans la formation, dans l'organisation et dans la préparation. «Il faudra se pencher sur la question des lois qui nous permettent pas de nous défendre et rechercher d'autres outils créatifs pour poursuivre la lutte. C'est pour ça qu'il y a un gros travail d'éducation populaire et de formation à faire. Plus il y aura de gens formés pour comprendre comment on prépare des stratégies, comment on les applique et comment on fait de notre mieux pour se protéger des conséquences, plus les personnes seront aptes d'agir avec sens.»

«En occupant des lieux et des bâtiments, ou en contrevenant à la loi, nous participons à une mise en scène du monde tel qu'il pourrait être si les personnes étaient libres et si la société était véritablement démocratique, conclut Dru Oja Jay, militant pour la justice climatique et l'information indépendante. Ce faisant, nous mettons en évidence les forces – lois, bureaucratie et forces policières – qui empêchent l'avènement de ce monde.»

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Texte de l'ouvrage collectif
Sortir le Québec du pétrole (éditions Somme toute), co-publié simultanément le 22 avril 2015, Jour de la Terre, dans le journal Ensemble, presse coopérative et indépendante, avec hyperliens et références interactives (783.ensemble.coop).

Avr 022015
 

Il est tentant de réduire une coopérative à son aspect commercial. La coopérative est une entreprise, c’est vrai. Mais son caractère collectif est déterminant dans son identité et dans ses fondements. C’est ainsi qu’on ne finance pas une coopérative de la même manière qu’on finance une société à capital-actions. La finalité d’une compagnie, c’est de rapporter de l’argent aux investisseurs tandis que la finalité d’une coopérative, c’est de répondre à un besoin d’un groupe de personnes.

À la constitution d’une compagnie, les investisseurs placent leur argent ensemble et espèrent le faire fructifier par la croissance de la compagnie, par les dividendes qu’ils recevront à même les marges de profit dont bénéficiera l’entreprise avec les années. La coopérative, quant à elle, vise la rentabilité et la subsistance de l’entreprise, afin de répondre aux besoins de ses membres et de la communauté. Les surplus budgétaires que dégage une coopérative ont longtemps été désignés comme des trop-perçus, et non des profits. Cette désignation rappelle que les coopératives ne doivent pas chercher à faire de l’argent sur le dos de leurs membres, comme nous le rappelle l’article 128 de la Loi sur les coopératives. Ce sont ces excédents budgétaires qui feront alors l’objet de la ristourne, considérant que la coopérative avait des tarifs trop onéreux pour ses membres.

Aussi, les membres de la coopérative ne disposeront pas des biens de la coopérative. Le principe juridique des patrimoines distincts s’applique. Autrement dit, en cas de poursuite contre la coopérative, les membres ne peuvent généralement pas être tenus responsable des fautes de celle-ci, et vice-versa. Et en cas de liquidation, les biens de la coopérative n’iront jamais entre les mains des membres, mais devront plutôt demeurer au sein du mouvement coopératif.

Alors, quand on cherche du financement pour notre coopérative, il importe de comprendre ce qu’est le capital social de celle-ci. Nos parts sociales représentent notre apport à la coop; c’est ce qui nous reviendra à la fin de notre lien avec la coopérative et c’est le risque qu’une personne accepte de prendre en adhérant à la coopérative. En cas de faillite de la coop, les parts sociales disparaîtront et il faudra en faire son deuil. Quand on investit dans des parts privilégiées, on assume également un grand risque financier.

Toutefois, ce sont des moyens intéressants pour financer notre coopérative, car les parts privilégiées bénéficient d’une durée minimale de trois ans, pendant lesquels notre argent peut techniquement fructifier. Après les trois années, si la coopérative ne peut rembourser les parts privilégiées, les intérêts continuent de se cumuler au bénéfice du membre.

Il est à noter que les parts privilégiées sont généralement dispensées de la conception d’un prospectus aux investisseurs potentiels en vertu de la Loi sur les valeurs mobilières. Le prospectus est ce document détaillé qui explique pour quelles raisons une entreprise cherche du financement auprès du public.

En cette ère de socio-financement et d’austérité, les coopérants devront faire preuve d’imagination pour financer leurs projets, car les gouvernements se font de plus en plus pingres, même pour encourager l’innovation et la solidarité.

Avr 012015
 

Veuillez noter que cet article, publié à l’occasion du premier avril 2015, est une fiction, tout comme plusieurs autres articles publiés dans les journaux ainsi que le veut la tradition. Au journal Ensemble, nous saisissons l’occasion pour utiliser exceptionnellement cette forme d’éditorial efficace et appréciée qu’est le canular. Les faits relatés n’ont donc pas eu lieu. Nous remercions les personnalités publiques réelles auxquelles le texte fait référence pour leur aimable compréhension.

Selon un courriel personnel dont Ensemble a obtenu copie, Pierre Karl Péladeau songerait à se retirer de la course à la direction du Parti québécois, à quelques semaines du scrutin. Le candidat, qui était en tête jusqu’à présent, évoque principalement des aspects stratégiques, mais aussi le fait qu’il n’aurait pas la «vocation» pour faire de la politique. Il craint par-dessus tout de nuire au projet d’indépendance du Québec. Il jonglerait avec l’idée de reporter ses appuis sur Martine Ouellet.

C’est dans une longue missive adressée par courriel à une amie de longue date (qui n’est pas à l’origine de la fuite et qui a requis l’anonymat) que Pierre Karl Péladeau se vide le cœur. «Je n’ai pas pu dire un mot de la campagne!», s’indigne-t-il. «Même mon nouveau personnel de communications m’enjoint de me la fermer, parce que je suis au sommet dans les sondages et que j’ai donc tout à perdre, explique le magnat de la presse, en ajoutant que ce silence forcé pourrait même durer jusqu’aux élections de 2018. C’est pas en se taisant comme ça qu’on va créer un mouvement fort pour l’indépendance!»

Il doute de son talent politique

«Mais les sondages, dans le fond, c’est une excuse, suggère-t-il. Je suis convaincu que la vraie raison pour laquelle mon entourage me fait taire, c’est qu’ils trouvent que je n’ai pas le talent nécessaire pour soulever les foules.» Le député de Saint-Jérôme rappelle à sa correspondante les nombreuses bourdes qu’il a commises depuis qu’il est entré dans l’arène, il y a plus d’un an. «J’ai toujours été un homme de l’ombre, souligne-t-il. Ma force, c’est prendre des décisions indiscutables et d’en informer mes exécutants, pas animer des débats de société.»

Il est vrai que l’actionnaire de contrôle de Québecor n’avait pas l’habitude de se faire remettre en question. «Je n’ai pas traversé quatorze lock-out pour me faire ridiculiser quotidiennement par les journalistes de Desmarais!», tonne-t-il.

Dimanche dernier, lors du débat, il a admis publiquement qu’il «ne croyait pas que la vie publique pouvait être aussi exigeante».

«J’avais plus d’influence à la tête de Québecor!»

«Parlons-en, des Desmarais, poursuit-il. Tandis qu’on me reproche de garder le contrôle de la moitié des médias du Québec tout en étant député, les Desmarais exercent un contrôle sur l’autre moitié, qu’ils vouent à la promotion du fédéralisme, sans avoir le moindre compte à rendre à qui que ce soit.»

Le difficile constat auquel arrive M. Péladeau, c’est que son entrée en politique était une mauvaise décision. «J’avais tellement plus d’influence à la tête de Québecor, se souvient-il avec nostalgie. Je pouvais décider du tournant dans la campagne électorale et de l’issue du scrutin en plaçant tout simplement une accolade entre Julie et Pauline en manchette de mes médias

Maintenant, regrette-t-il, «tout ce qui est publié par Québecor est considéré comme suspect en partant, et les Desmarais ont la mainmise sur l’opinion publique. Si ce n’est pas le cas, explique-moi pourquoi on a perdu l’an passé!» PKP va jusqu’à reconnaître avoir ruiné l’héritage stratégique de son père, qui avait «eu le courage de créer un empire médiatique pour faire face à celui des fédéralistes».

Il place ses espoirs en Martine

«Pendant qu’on me fait taire, il y a à côté de moi des candidats valeureux qui ont plein de belles choses à proposer, et ils restent dans l’ombre, lance-t-il avec dépit. Prends Martine, par exemple. Elle a une stratégie radicalement claire et efficace pour l’indépendance, mais aussi en santé, pour les transports, pour l’industrie, et tout en respectant l’environnement. Les médias parlent encore moins d’elle que des autres parce que c’est une femme, mais entre nous, j’ai beaucoup plus confiance en elle qu’en moi. Pourtant, c’est moi qui ai la puck et on me dit de tourner en rond entre les deux lignes bleues.»

Sa conclusion: «pour toutes ces raisons, je crois que pour moi, rester dans la course, c’est nuire au projet d’indépendance du Québec. Je serais mieux de m’en retourner diriger mes médias de masse et livrer la bataille décisive de l’opinion publique à ce poste en laissant aux autres les débats et les discours.»

Encore hésitant sur la décision qu’il prendra, il ne laisse pas beaucoup de doute à sa correspondante: «je me laisse le temps d’y penser, et d’avoir ton avis, mais à moins que je change d’idée, je ferai une annonce à cet effet mercredi prochain, le 1er avril.»

 

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Mar 042015
 

Lancement d’album, shower de bébé, party d’initiation, enterrement de vie de jeunesse, collation des grades, mariage ou baptême… peu importe le visage que vous donnerez à l’événement fondateur de votre coopérative, il faut qu’il soit une célébration qui reste gravée dans la mémoire des membres. Votre plan d’affaires est béton, votre campagne d’engagement préconstitutif est un succès, vous êtes prêts à confier votre structure démocratique à une équipe du tonnerre pour répondre au besoin identifié. Dans le cadre de notre série Comment démarrer une coopérative?, voici quelques conseils pour l’assemblée générale d’organisation. C’est la première grand messe de votre coop. Faites sonner les cloches!

Il faut que l’Assemblée générale d’organisation (AGO) soit à l’image de votre coop. Êtes-vous dans le secteur gastronomique ou alimentaire? Régalez vos membres. Dans le secteur technologique? Faites le dévoilement d’un prototype. Dans l’artisanat ou l’art? Lancez une gamme ou faites le vernissage d’une exposition. Une coop d’habitation? Un BBQ. Ce ne sont que quelques exemples…

Donner le feu sacré

Parce qu’au-delà de la formalité administrative, dites-vous bien que ce qui motivera vos membres et vos premiers administrateurs à traverser les défis du démarrage pendant trois à cinq ans, c’est le sentiment d’appartenance à la coop. C’est un lien affectif qui ne s’écrit sur aucun formulaire, qui ne s’adopte pas avec une proposition, un appui et un vote. Mais ce lien d’amour est la base du ciment qui tiendra votre coop contre vents et marées.

Les aspects techniques sont importants, toutefois, et votre Coopérative de développement régional (CDR) saura vous guider à travers ceux-ci. Il faut faire les choses dans l’ordre. Mais sur cette base, vous pouvez ajouter des éléments qui vous semblent importants.

Même si la loi des coopératives ne demande pas que soient formellement adoptées certains aspects du projet en AGO (plan d’affaires, vision, stratégies, produits), il est intéressant de donner du temps et de l’espace à ces aspects pour que les membres prennent une part active, démocratiquement, non seulement à ce qui est juridique, mais également aux aspects pratiques du projets.

Créer une tradition démocratique

Votre AGO, c’est la mise en place de la tradition démocratique de la coopérative. Ainsi, chaque Assemblée générale annuelle (AGA) qui suivra sera inspirée de l’AGO. Si votre politique d’achats, votre politique éditoriale ou votre code d’éthique ont été adoptés par vos membres en AGO, ils s’attendront à ce que vous continuiez à les consulter sur ces aspects lors de chaque AGA ou même en continu.

Ce qui est trop souvent négligé par les coopératives, dans le feu de l’action des opérations et surtout pendant le démarrage, c’est le lien démocratique avec les membres. L’AGO est une occasion de mettre en place des structures simples où les membres peuvent participer au développement de la coop, et d’adopter des processus de consultation efficaces. C’est ce qui fera la différence entre votre coopérative et toute autre entreprise capitaliste.

Cet article conclut la première édition du Guide coop Ensemble. Mais il est à prévoir que d’autres s’ajouteront pour répondre aux questions qui nous sont fréquemment adressées. À bientôt!

Depuis la fondation du journal Ensemble, avec la publication de centaines d’articles spécialisés sur les coopératives et d’un livre sur l’Année internationale des coopératives en 2012, de nombreux groupes ont sollicité notre équipe pour avoir des conseils et de l’information en vue du démarrage de leur propre coop. Nous publions dans cette série d’articles un résumé des étapes que nous recommandons. Ces articles seront mis à jour à l’occasion.

Fév 202015
 

Il ne faut pas mettre la charrue devant les bœufs, c’est bien connu. Mais en démarrant une coopérative, on peut tout de même les mettre côte à côte. Un procédé méconnu permet en effet d’aller chercher son financement en même temps qu’on prépare la fondation officielle la coop. Ainsi, on démarre le projet si et seulement si le financement est au rendez-vous. Ce joker coop s’appelle l’engagement préconstitutif. Ne vous en privez pas! Dans le cadre de notre série Comment démarrer une coopérative?, voici comment procéder dans les règles de l’art.

Le principe de l’engagement préconstitutif est simple: c’est de vous permettre de recruter vos membres avant la fondation de la coopérative. En gros, les futurs membres signent un papier qui dit: «Ce projet répond à mes besoins, et je m’engage donc à verser, lors de l’assemblée générale d’organisation, le montant suivant à souscrire en parts sociales.» Évidemment, ce paiement est conditionnel à ce que la coop soit effectivement fondée. Les gens sont donc certains de ne pas perdre leur contribution.

Pour procéder, procurez-vous auprès de votre Coopérative de développement régional (CDR) un modèle de formulaire d’engagement préconstitutif, que vous adapterez à la réalité de votre projet. Munissez-vous d’une version attrayante de votre plan d’affaires que vous pourrez montrer aux futurs membres, sans nécessairement leur en laisser un exemplaire, ainsi que tout autre outil promotionnel (maquette, prototype de produit, etc.).

Ensuite, vous pouvez mener votre campagne d’engagement préconstitutif. Cette campagne peut être menée par chacun des membres de votre comité provisoire, ou nécessiter l’engagement d’un représentant ou d’une représentante aguerrie.

Une fois votre campagne complétée, compilez les résultats et conservez précieusement les formulaires d’engagement préconstitutif signés. Vous pouvez maintenant vous présenter aux autres bailleurs de fonds (organismes publics, institutions financières, etc.), armés de cette mise de fonds virtuelle, qui n’en est pas moins officielle. La somme des engagements préconstitutifs des membres constitue la «mise de fonds du promoteur», dans leur langage.

Les bailleurs de fonds pourront donc vous donner une confirmation de leur propre investissement dans votre projet, ce qui vous permettra à votre tour de confirmer aux membres que le projet de coop deviendra réalité, et de les convoquer à l’Assemblée générale d’organisation, soit la véritable fondation de la coop. Nous reviendrons sur cette étape ultime dans un prochain article.

À bientôt!

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Fév 132015
 

Il est temps de mettre sur papier tout ce que vous avez en tête à propos de votre projet. Et ça, personne ne peut le faire à votre place. Les professionnels de la Coopérative de développement régional (CDR) pourront vous fournir des modèles et vous donner leur avis sur votre planification, mais c’est à vous de faire l’essentiel du travail. Voici tout de même, dans le cadre de notre série Comment démarrer une coopérative?, quelques perspectives qui sont propres aux coops et qui peuvent vous aider à aborder cette tâche d’un œil averti.

Voilà, vous avez votre modèle fourni par la CDR ou tout autre organisme d’aide au développement entrepreneurial de votre localité. Tout ce que vous avez longuement muri, il suffit de le trier et d’en placer chaque facette dans la bonne section, sachant que toutes les sections ne s’appliquent pas nécessairement à votre projet. Sans aller ici dans le détail, ces sections couvriront autant les opérations que la structure coopérative et les ressources humaines, ainsi que les assurances, normes, associations et lois à respecter, puis les inévitables prévisions budgétaires.

Cibler le besoin

Un élément central du plan d’affaires est l’étude de marché. Cette section sert souvent, pour les entreprises capitalistes, à expliquer comment on va «créer le besoin», et définir un marché cible à «conquérir». Dans le cas d’une coopérative, l’étude de marché est plutôt la définition d’un besoin existant. Il faut révéler ce besoin, lui permettre de s’exprimer. C’est là que la dimension démocratique de la coop prend sa racine.

Ce besoin, vous l’avez déjà identifié. Il faut maintenant le définir. Combien de personnes le vivent, à quelle fréquence, avec quelle acuité? La définition du besoin par l’étude de marché, c’est aussi ce qui va guider l’établissement de la tarification. Ici, l’entreprise capitaliste essaiera de déterminer «jusqu’à combien la clientèle ciblée est prête à payer». La coopérative, elle, tentera plutôt d’identifier le «juste prix» permettant de rémunérer efficacement le travail tout en favorisant l’accès au produit par le plus grand nombre de personnes.

L’adhésion du milieu

Une coop, c’est un projet collectif, qui s’intègre lui-même dans une collectivité. Si l’implantation d’une entreprise capitaliste est déterminée par la compétition, c’est plutôt la complémentarité qui est le fondement de l’intégration d’une coopérative au marché. Si la coop du village voisin répond au besoin, le but est atteint et il n’est nul besoin de l’absorber pour faire une plus grande coop. On s’en inspirera plutôt pour répondre au besoin de ce village-ci, et alors on tissera des liens de partenariat entre les deux coops.

Aussi, le plan d’affaires d’une coop doit-il faire la démonstration de l’adhésion du milieu dans lequel s’implantera la nouvelle entreprise. Une démarche de concertation autour du projet permettra d’ajouter en annexe des lettres d’appui d’organismes ou de personnes reconnus dans le secteur d’activité, ainsi que des lettres d’intention de partenariat d’autres coopératives qui œuvrent dans le même secteur ou dans des secteurs complémentaires.

Dans un prochain article, vous découvrirez aussi un outil permettant de révéler l’appui et l’engagement d’une large population à votre projet.

Équité pour les fondateurs

Démarrer une entreprise, c’est investir beaucoup de temps et d’énergie pendant cinq ans, au moins. Les fondateurs de coopératives ne font pas exception à cette règle et se donneront tout entiers pendant des années à leur projet. Pourtant, ils auront ni plus ni moins que les mêmes droits démocratiques que les membres qui adhéreront à la coop après que cette étape difficile ait été complétée. C’est le paradoxe soulevé par Bruno Blais, fondateur de la célèbre brasserie coop La Barberie, lors du forum coopératif de Québec au printemps 2012.

Si vous souhaitez prévoir plus d’équité entre les fondateurs et les futurs membres de votre coop, c’est à l’étape du plan d’affaires qu’il faut y penser.

À la Coopérative de journalisme indépendant, nous avons tenté d’inventer un système permettant de rétablir une équité pour les fondateurs, en utilisant les parts privilégiées, et nous l’avons inscrit dans le règlement de régie interne. Selon ce principe, tout le travail fait pour démarrer la coopérative est facturé par les membres, mais pendant la phase de démarrage, la partie des honoraires qui ne peut être versée en argent est souscrite par les membres en parts privilégiées du même montant dans la coopérative. Cela veut dire qu’ils détiennent un actif dans la coopérative qui sera remboursable au plus tôt trois ans après, et à la condition que les finances de la coopérative le permettent (article 38 de la loi). Cela permet de reconnaître leur investissement et de leur rendre à long terme, même s’ils ont quitté la coopérative.

Ce n’est pas un système parfait, car dans une coopérative à but non lucratif les parts privilégiées ne portent pas intérêt. D’autre part, il est difficile de quantifier tous les efforts investis, et nous devons reconnaître que ce qui a été souscrit en parts privilégiées n’en représente qu’une petite partie. En effet, ces valeurs restent taxables et imposables, et lorsqu’il s’est agi de gros montants, les membres n’ont pas voulu payer des impôts sur des sommes qu’ils ne toucheront pas tout de suite, tandis que la trésorerie de la coopérative ne pouvait se permettre d’assumer même les taxes sur ces montants. Enfin, notre secteur d’activité génère si peu de revenus que nous n’avons pas encore pu commencer à rembourser les parts (vous pouvez nous aider en contribuant!).

Malgré ces inconvénients, nous pensons qu’il faut étudier cette avenue et qu’éventuellement la Loi des coopératives pourrait prévoir un système d’équité semblable dans l’avenir.

À bientôt!

Depuis la fondation du journal Ensemble, avec la publication de centaines d’articles spécialisés sur les coopératives et d’un livre sur l’Année internationale des coopératives en 2012, de nombreux groupes ont sollicité notre équipe pour avoir des conseils et de l’information en vue du démarrage de leur propre coop. Nous publions dans cette série d’articles un résumé des étapes que nous recommandons. Ces articles seront mis à jour à l’occasion.

Fév 102015
 

Le militant Gilles Rhéaume est décédé durant la nuit du 7 au 8 février à l’Hôpital Pierre-Boucher de Longueuil, à l’âge de 63 ans. Après avoir milité toute sa vie pour la défense de la langue française et pour l’indépendance du Québec, notamment comme président de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal de 1981 à 1985, M. Rhéaume a poursuivi son engagement à Sorel-Tracy en y fondant la Ligue richeloise contre la tyrannie pétrolière. Il y livrait un vibrant discours à l’occasion de la manifestation du 26 octobre dernier, et nous le reproduisons ici accompagné d’un extrait vidéo.

«Le Saint-Laurent contient les plus grandes réserves d'eau douce du monde, et nous disons «Non!» aux produits pétroliers sales qui nous viennent de l'Alberta et qui vont être exportés à l'extérieur. De partout au Québec, des gens nous appuient par milliers. Nous allons arrêter ce maudit transport. Nous l'arrêterons par tous les moyens, grâce à vous. Unissons-nous. Oublions nos couleurs politiques le temps de ce combat, et faisons en sorte que ces bateaux de la mort, que ces wagons de la mort, disparaissent de notre paysage. Vive le Bas-Richelieu!» – Gilles Rhéaume, 26 octobre 2014, Sorel-Tracy.

Voici la captation vidéo de son discours, suivi des interventions de Louse Rémy, d'Alerte Pétrole Rive-Sud, de Dominic Champagne, metteur en scène et militant, ainsi que de Corina Bastiani, organisatrice de l'événement qui donnait le coup d'envoi à la marche:

Fév 062015
 

Parions que déjà, on a tenté de vous décourager de votre projet de coop, à grands coups d’exemples de coops qui ont raté leur coup: structure trop lourde, bisbille dans l’équipe, détournements, fraude. Les histoires d’horreur existent malheureusement dans le monde coop comme dans celui des entreprises capitalistes. La différence, c’est qu’il est possible de donner à une coop une solide structure démocratique qui permette d’éviter ces dérives. Voici, dans ce second article de la série Comment démarrer une coopérative?, quelques erreurs à éviter pour mettre votre coop à l’abri!

Dans l’enthousiasme de mettre au monde leur bébé entreprise, les fondatrices et fondateurs négligent parfois de porter l’attention nécessaire à l’élaboration de leur structure démocratique. C’est fastidieux, c’est technique, mais c’est pourtant essentiel. À qui donne-t-on le pouvoir de décider? Aux clients, aux travailleurs, aux producteurs, aux habitants du village? Peut-on faire cohabiter des intérêts différents les uns des autres?

On ne peut pas ouvrir la porte à tout le monde sous prétexte que c’est un projet collectif et fondé sur de bonnes intentions. Les structures, les lois et les règlements, ce n’est pas fait pour servir quand tout va bien. Les règles sont faites pour les pires moments: quand les conflits émergent, quand les intérêts contraires à celui de la coop se pointent le nez. Quand on se marie, on signe souvent sans regarder. Mais lors du divorce, on est content qu’il y ait des lois qui régissent une telle situation dans le Code civil.

Le pouvoir au lien d’usage le plus fort

Dans une entreprise capitaliste, le pouvoir va automatiquement aux personnes qui ont investi le plus d’argent, peu importe l’importance que l’entreprise représente pour eux. Dans un organisme à but non lucratif (OBNL), le pouvoir va à un conseil d’administration (CA) issu de la communauté, en espérant que ces personnes se sentent assez concernées. Dans une coop, vous avez la chance de donner le pouvoir décisionnel, celui de participer au CA, à la ou aux catégories de membres de votre choix. C’est là un choix décisif!

Il faut identifier le groupe d’intérêt qui formera la catégorie de membres pour qui la coop est très importante. Ce sont les personnes dont la coop répond à un besoin primaire, autant que possible. C’est ce qu’on appelle le «lien d’usage». Se loger, c’est un besoin primaire, travailler aussi. Ce sont des liens d’usage forts. Le membre travailleur, pour qui la coop représente son gagne-pain, risque beaucoup moins de prendre des décisions nuisibles à la coop que le client pour qui la coop signifie prendre un café de temps en temps (un lien d’usage très faible).

Selon votre projet, il s’agit d’identifier le lien d’usage le plus fort. Est-ce celui des producteurs qui dépendront de la coop pour la mise en marché efficace et équitable de leurs produits? Est-ce celui des consommateurs qui pourront se nourrir de produits sains et équitables à prix avantageux? Est-ce celui des travailleurs qui y gagneront leur vie? Selon votre réponse, vous choisirez une coop de producteurs, une coop de consommateurs ou une coop de travailleurs.

Par exemple, la Coopérative de journalisme indépendant, éditeur du journal Ensemble, est une coop de producteurs formée par les journalistes pigistes. Pour adhérer, ceux-ci doivent respecter de sévères critères d’indépendance. Ce choix permet de s’assurer que l’enjeu sensible de l’information reste protégé des pressions qui pourraient être exercées par les clients publicitaires, ou même par les lecteurs. Objectivement, le journal Ensemble est moins essentiel pour ces deux groupes d’intérêt que pour les journalistes qui y travaillent à la pige.

Coop de solidarité

La coopérative de solidarité est un autre modèle très en vogue depuis son apparition au tournant du millénaire. Cette structure permet de faire cohabiter plusieurs catégories de membres dans une même coop. Ce faisant, elle ouvre la porte à des conflits d’intérêts qu’il est essentiel d’éviter.

Deux catégories de membres peuvent avoir des intérêts divergents, et c’est très légitime. Par exemple, les producteurs veulent avoir le meilleur prix pour leur produit, et les consommateurs exigent au contraire de payer le moins possible.

Dans ce cas, il est très important de choisir une catégorie de membres principale, et même d’exclure certaines catégories. Dans une coop de solidarité à «dominante consommateurs», par exemple, on pourra très bien choisir d’exclure les producteurs et de limiter le nombre de sièges des membres travailleurs au CA. Dans une coop de solidarité à «prédominance travailleurs», on limitera les producteurs à un siège au CA et on exclura les consommateurs. Si l’on garde toutes ces catégories, il faut s’assurer qu’une d’entre elles détienne le plus grand nombre de sièges au CA.

Une coop de solidarité doit aussi accorder au moins un siège du CA, et au maximum un tiers de ces sièges, à une nouvelle catégorie de membres, appelée «membres de soutien». Si le lien d’usage d’un groupe d’intérêt est trop faible mais qu’on souhaite tout de même la voir représentée au CA, on peut lui donner ce statut de membre de soutien. Par exemple, les lecteurs du journal local coopératif, dont on souhaite la participation à la coop même s’ils n’ont pas de lien d’usage financier, peuvent se voir confier le rôle de membres de soutien.

Comme le veut l’adage, «le diable est dans les détails», et si vous voulez que votre coop prospère contre les vents et les marées qui ne manqueront pas de battre sa coque, il faut que celle-ci soit solide. Ce texte avait pour mission de vous confier certains principes de base pour guider la construction de votre structure coop. Il vous faudra maintenant la traduire sur papier dans le règlement de régie interne, avec l’aide de votre Coopérative de développement régional (CDR), dont voici la liste. La semaine prochaine, nous aborderons le plan d’affaires, qui est l’ADN de votre projet.

À bientôt!

Depuis la fondation du journal Ensemble, avec la publication de centaines d’articles spécialisés sur les coopératives et d’un livre sur l’Année internationale des coopératives en 2012, de nombreux groupes ont sollicité notre équipe pour avoir des conseils et de l’information en vue du démarrage de leur propre coop. Nous publions dans cette série d’articles un résumé des étapes que nous recommandons. Ces articles seront mis à jour à l’occasion.

Jan 302015
 

Une idée géniale et de belles valeurs, est-ce tout ce qu’il vous faut pour démarrer une entreprise coopérative? Il suffit ensuite de choisir un marché prometteur où implanter l’entreprise, de convaincre les gens que c’est une idée géniale, puis de trouver quelques personnes pour former le CA et enfin d’aller chercher du financement… STOP! Non, ça ne fonctionne pas ainsi. Une coop, c’est une démocratie. Ça commence par un besoin collectif exprimé par des personnes de la communauté. Ensuite, on peut réunir ces personnes et établir un plan pour répondre à ce besoin. Dans le cadre de notre série Comment démarrer une coopérative?, quelques conseils pour démarrer du bon pied, au pluriel!

L’économie capitaliste dans laquelle nous vivons nous a habitué à penser qu’on démarre une entreprise pour faire de l’argent, pour la faire prospérer et ensuite la revendre à un bon prix. Qu’on soit un actionnaire qui surfe sur les titres de Google et de Monsanto, ou un honnête propriétaire dont l’entreprise est le seul fond de retraite, la finalité reste le profit. Mais pour la coopérative, le but est tout autre: c’est de répondre à un besoin.

Votre besoin est-il un besoin primaire? C’est un bon départ. Les besoins primaires sont ceux qui créent les liens d’usage les plus solides dans une coop. Se nourrir, se loger, travailler, avoir accès à l’eau potable… quel est le besoin? Souvent, c’est un besoin auquel ni l’entreprise privée ni l’État ne répondent dans votre région. Pénurie de médecins? Créez une coop de santé. Aucun investisseur privé n’est intéressé à racheter l’épicerie ou le dépanneur du coin? Formez une coop de services de proximité. Le propriétaire de votre shop prend sa retraite et n’a pas de relève? Proposez à vos collègues de sauver vos emplois en mettant sur pied une coop de travailleurs ou une CTA.

Si votre point de départ est une idée géniale, innovatrice, cherchez le besoin qui est derrière cette idée et les personnes qui partagent ce besoin. C’est ainsi que sont nés les espaces de travail partagé: un travailleur autonome s’est dit que «ça serait donc plus cool d’aller travailler dans un endroit agréable tous les matins avec des collègues plutôt que tout seul dans mon demi sous-sol». D’autres pigistes avaient le même besoin. Ils se sont regroupés en coop et des Ecto, des Créagora et des Noburo sont nés un peu partout.

Les personnes qui partagent le besoin: voici le groupe. Ce sont les personnes qui ont un fort intérêt à ce que la coop soit créée et qu’elle fonctionne. Ce sont les citoyens de la coop. On les appelle les membres. Si la coop regroupe plusieurs catégories de membres qui ont des besoins et intérêts différents, il faut identifier parmi ceux-ci celui qui est le plus important, mais nous y reviendrons dans le deuxième article.

Parce que pour tout projet, le facteur individuel est très important, il faut bien choisir les premiers membres. Ils seront les racines de la coop. Il faut qu’ils soient capables de relever des défis ensemble. C’est peut-être là que la coop ressemble le plus à toute autre entreprise: il faut que l’équipe de base soit prête à aller à la guerre ensemble (j’exagère à peine), prête à encaisser les coups les plus durs, prête à partager les sacrifices qui sont le lot de tout entrepreneur. Bref, il faut que cette équipe de base soit plus solide… qu’un couple!

Ces personnes, on les réunit pour bien comprendre le besoin, dans un contexte cordial (un apéro, un bon repas ou une journée de plein air, parce qu’il faut tout de même que ce soit agréable!). Si le besoin justifie qu’on crée un projet d’entreprise pour y répondre, on forme un comité provisoire et on fait appel à des ressources spécialisées pour accompagner la démarche. Dans toutes les régions du Québec et en Acadie, il existe des Coopératives de développement régional (CDR). Elles sont la porte d’entrée pour tout projet de coop. Pour quelques centaines de dollars, elles vous accompagneront efficacement jusqu’aux premières années d’opération de l’entreprise, et resteront toujours à vos côtés ensuite.

La première chose que la CDR vous aidera à produire, c’est un plan d’affaires. Ce plan ne sera crédible et efficace que s’il est fondé sur un besoin réel et porté par un groupe motivé. Dans un prochain article, nous verrons quelles sont les principales erreurs à éviter dans la construction de votre démocratie coopérative.

À bientôt!

Depuis la fondation du journal Ensemble, avec la publication de centaines d’articles spécialisés sur les coopératives et d’un livre sur l’Année internationale des coopératives en 2012, de nombreux groupes ont sollicité notre équipe pour avoir des conseils et de l’information en vue du démarrage de leur propre coop. Nous publions dans cette série d’articles un résumé des étapes que nous recommandons. Ces articles seront mis à jour à l’occasion.

Déc 192014
 

Il a fait sensation lors de son témoignage à la Commission Charbonneau. Bernard «Rambo» Gauthier a fait l’objet d’une biographie publiée cet automne aux Éditions Trois-Pistoles. Victor-Lévy Beaulieu y raconte la protection des chantiers et des travailleurs de la Côte-Nord par le bouillant syndicaliste de la construction, au prix de quelques règles contournées et d’actions musclées. Protéger les régions? Face à l’austérité, aux centaines de mises à pied dans les régions dont le gouvernement démantèle sans discernement les structures de développement et de services, quelle sera votre résistance? Comment protégerez-vous votre communauté? Où est votre Rambo?

Je ne vous dirai pas grand chose du livre*. Disons seulement qu'on y découvre sous la plume épique de Victor-Lévy Beaulieu un Rambo empreint de justice sociale, et qui ne s'embarrasse pas de détails pour la défendre. Un de ceux qui, comme en son temps Michel Chartrand, iront jusqu'à défier la loi si celle-ci est injuste.

Le gouvernement a choisi son camp

Injuste, comme le sont les politiques d'austérité actuelles. Le gouvernement a choisi son camp: pour les intérêts privés, multinationaux, pour les riches, pour les «paradis» fiscaux, pour les fossoyeurs du climat, pour les épuiseurs de ressources naturelles, pour les destructeurs de l'environnement, bref pour l'argent.

Oui, le gouvernement a choisi son camp: contre les populations des régions, contre l'éducation des enfants, contre l'émancipation des femmes, contre le développement et l'autonomie locales, contre l'expertise en économie sociale, contre les Premières Nations, contre les agriculteurs et les agricultrices, contre la santé, contre l'éducation, bref contre le peuple.

Le gouvernement coupe tout ce qui limite ou remet en question son pouvoir, tout ce qui s'adresse au peuple, aux êtres humains. De l'autre main, il donne notre argent aux compagnies (dans le Nord autant que possible), il donne aux riches.

Le gouvernement se désengage de sa mission envers la population et concentre le pouvoir entre ses mains, tout en matraquant les manifestants. Je dis le gouvernement au singulier pour simplifier. Mais bien entendu, ici au Québec, des gouvernement prédateurs, nous en avons deux.

Le gouvernement veut diviser

Le gouvernement coupe des emplois, des centaines d'emplois qualifiés dans les régions. Toutes les personnes qui étaient en charge de créer du développement, d'amener des jeunes à s'établir dans les régions, de protéger celles-ci: CLD, CRÉ, CJE… (une liste a été dressée à Rimouski, reproduite ci-après). Il crée des centaines de chômeurs compétents, qui ont à cœur leur région, leur communauté.

Le gouvernement crée une crise, divise les gens: ceux qui perdent leur emploi et ceux qui ont peur de le perdre. Et si nous résistons à la division, puisque nous la savons arbitraire et préméditée? Cette «déclaration de guerre» adressée au peuple par le gouvernement, n'est-ce pas plutôt une invitation à s'organiser? Ce saccage organisé n'est-il pas même une invitation à désobéir?

Que faire? Opération Dignité 2015

En démantelant les régions, le gouvernement a créé un immense groupe de personnes libres, qualifiées, qui peuvent consacrer leur temps à développer une alternative. Que ceux et celles qui ont encore leur emploi étirent leur créativité au maximum pour aider ceux qui l'ont perdu. Que ceux qui l'ont perdu utilisent leur période de chômage pour travailler à bâtir une nouvelle représentation régionale démocratique, plus démocratique que ce gouvernement qui ne nous représente plus.

Un mouvement s'est levé avec la campagne «Touche pas à mes régions». Ce mouvement peut et doit devenir un contre-pouvoir, et même une alternative. Il lui faudra une structure solide et démocratique. La coopérative est considérée comme la structure démocratique la plus souple, la plus simple et la plus solide qui soit, si elle est bien construite. Pourquoi ne pas la mettre au service du pouvoir populaire?

Coop de représentation populaire

En tant que coopératiste jamais à court d'idées, je vous ai même imaginé un nouveau type de coopérative pour construire et pour financer cette nouvelle représentation populaire. Elle permet même de créer un contre-pouvoir plus légitime que le pouvoir existant. Je l'ai appelé «Coopérative de représentation populaire». Pour le mode d'emploi, c'est téléchargeable ici:

Ce n'est pas la première fois qu'on menace de fermer les régions. Dans les années 1970, les populations se sont mobilisées en masse, ont occupé des églises, y ont séquestré des représentants gouvernementaux, pour sauver leur village. Ces Opérations Dignité ont été menées par des hommes et des femmes courageux, comme le regretté Gilles Roy. Il est temps de leur faire honneur en poursuivant leur combat.

Où est votre Rambo?

Géants que nous sommes, explorateurs de continent aux ancêtres amérindiens et européens, d'un sang mêlé plus fort que l'inconnu, serons-nous ce peuple trop souvent décrit comme de petits moutons passifs par les puissants de notre Histoire, prêtres, colonisateurs ou patrons, afin de nous tenir «tranquilles», même pendant une «révolution» alors que notre nombre et notre jeunesse les faisaient trembler derrière leur masque?

Le chantier est immense: reconstruction de nos solidarités, décentralisation des pouvoirs, création d'une économie locale équitable et soutenable, transition énergétique. Tous ces espoirs sont liés par le même grand mur contre lequel ils se frappent sans cesse: le détournement de notre démocratie.

Notre gouvernement est un train de la mort qui a décroché ses wagons de passagers pour foncer encore plus vite dans la mauvaise direction. Il est notre devoir, même s'il faut pour cela contourner quelques règles, de résister, et de saisir l'occasion pour nous rassembler et construire l'avenir.

Voir la liste des impacts des politiques d'austérité à Rimouski, Par Marie-Neige Besner

* Étant aussi partiellement à l'emploi des Éditions Trois-Pistoles, commenter le livre me placerait en conflit d'intérêts selon notre éthique journalistique, qui exige par ailleurs que cette situation soit ici et ainsi déclarée.