Fév 062024
 

Certains se souviendront du journal Ensemble !, publié dès les années 1940 sous la direction de Georges-Henri Lévesque, et qui était le journal des coopératives et du coopératisme au Québec. Ceux qui ont été présents l’an dernier à la Conférence internationale Quel projet de société pour demain ? à Lévis ont tenu dans leurs mains les premières éditions d’un nouveau journal Ensemble, publiées quotidiennement par une équipe de bénévoles.

Ces jeunes coopérateurs motivés ont fondé la Coopérative de journalisme indépendant, avec l’appui de leurs deux co-présidents d’honneur, Claude Béland et Raymond Corriveau. C’est dans le cadre de la journée On change de modèle, du Forum international de l’économie social et solidaire (FIESS) que Gérald Larose, président de la Caisse d’économie solidaire Desjardins, a procédé au lancement officiel du nouveau journal Ensemble, presse coopérative et indépendante, lundi dernier.

Gérald Larose, président de la Caisse d’économie solidaire Desjardins, présente le journal Ensemble aux 250 participants à la journée On change de modèle, du Forum international de l’économie sociale et solidaire (FIESS):

Ce journal a pour mission de redonner aux citoyens accès à une information de qualité, notamment sur la coopération, les coopératives, les mutuelles, l’économie sociale et solidaire. Pour Raymond Corriveau, co-président d’honneur, « ce que ça nous permet de faire, c’est de retrouver l’essentiel de l’espace public. Pas l’espace concentré, mais l’espace public, avec ses différentes idées, discussions, débats, ensemble, on arrive à créer une intelligence collective. »

Raymond corriveau, co-président d’honneur, présente le journal Ensemble:

Formés en coopérative, ils invitent tous les citoyens et organismes à participer, à devenir membres, à s’abonner, à annoncer dans les pages d’Ensemble. Ce qui est important, « c’est l’économie solidaire qu’on crée grâce aux coopératives, souligne Claude Béland, co-président d’honneur. Cette économie-là est une alternative au désastre actuel du système dominant. Donc c’est très important que le réseau, lui, vive ensemble. » Soutenir le développement de ce médium, c’est permettre au projet de société coopératif de rejoindre le plus large public possible, vers l’Année des coopératives en 2012, et plus loin encore !

Parce qu’ensemble, on va plus loin.

Claude Béland, co-président d’honneur, présente le journal Ensemble:

 

Jan 282018
 
«Généralement, les organisations coopératives, mutualistes ne sont pas bien connues. (...) Il faut créer un mouvement.» - Monique F. Leroux, présidente et chef de la direction du Mouvement Desjardins Photo: Nicolas Falcimaigne

À l’occasion du lancement de l’Année des coopératives, tenu à Lévis le 12 janvier dernier, le journal Ensemble a eu l’occasion d’interroger Monique F. Leroux, présidente et chef de la direction du Mouvement Desjardins. Premier groupe financier coopératif au Canada, sixième dans le monde, avec un actif de plus de 188 milliards de dollars, Desjardins est l’un des plus importants employeurs au Canada avec 43 600 employés. Illustration du leadership mondial exercé par cette coopérative financière québécoise, le Sommet international qu’elle organise à Québec du 8 au 11 octobre 2012 réunira 2 000 participants de partout dans le monde, ainsi que 125 conférenciers de renom. Quelle est sa vision du contexte mondial actuel ?

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Nov 182015
 

Voilà qu’un bref aperçu de la violence quotidienne du reste du monde frappe au cœur de l’Occident. Aussitôt, se referment les frontières. Sur ces frontières qui nous séparent de l’autre, qui protègent notre bien commun, mais surtout individuel, sur ces frontières se déploient les douaniers, la police ou l’armée à qui l’on a délégué la violence. Nous leur avons confié la violence avec laquelle nos ancêtres protégeaient autrefois la propriété, celle dont l’autre est privé, et dont il pourrait s’emparer en utilisant la violence. Violence et propriété forment un couple parfait, tout comme leurs enfants terribles: le capitalisme et la guerre.

Ce lien entre la violence et la propriété a été souligné par Léon Tolstoï à la fin du dix-neuvième siècle. Au milieu des guerres sanglantes de cette époque s’est imposé le capitalisme, ou autrement dit l’exploitation des humains et de la nature pour maximiser le rendement sur le capital investi. Depuis, le capitalisme et la guerre n’ont cessé de se «perfectionner», l’un investissant dans l’autre, et l’autre se nourrissant de l’un.

Profit sur le pétrole pour lequel on fait la guerre, profit sur les bombes jetées sur les rebelles, profit sur les armes vendues aux rebelles, profit sur les drapeaux et sur les cercueils des militaires, profit sur l’équipement de sécurité accrue dans les aéroports, profit sur le transport des soldats, des rebelles et des réfugiés, profit sur la prime d’assurance du gratte-ciel, profit sur les vivres distribués par les organisations humanitaires, profit sur les terres qui les ont produits et dont les populations ont été chassées, profits sur les médias aux cotes d’écoute gonflées par l’horreur… Profit sur les causes, profit sur les conséquences: toujours, le capital profite, et l’humain crève.

Le capitalisme est la violence. Le «bénéfice» que l’investisseur tire de son investissement n’est rien d’autre qu’un vol qualifié: c’est le fruit confisqué du labeur de chaque humain qu’il exploite, c’est l’eau potable de chaque rivière qu’il pollue et dont il prive les générations futures, c’est l’océan vide, acide et radioactif dont plus personne ne pourra pêcher le poisson, c’est la forêt sans arbres volée à sa biodiversité disparue à jamais.

La révolution industrielle a donné des moyens infinis à la cupidité humaine et a solidement installé au sommet des valeurs capitalistes la propriété. Depuis le dix-neuvième siècle, le pouvoir ne vient plus de la noblesse héréditaire, il vient de la propriété. Pourtant, c’est aussi en plein cœur de la révolution industrielle que naissait déjà l’alternative discrète qui forme aujourd’hui les bases du monde destiné à remplacer le capitalisme, et peut-être la violence qui vient avec.

Cette autre voie n’est pas le communisme: le vingtième siècle nous a bien appris, millions de victimes à l’appui, que l’État ne peut gérer la totalité sans devenir… totalitaire. Non, l’alternative qui se développe depuis 150 ans au sein même de nos économies de marché, c’est la coopération. Les coopératives testent depuis plus d’un siècle leur capacité à remplacer le capitalisme dans tous les secteurs: agriculture, finance, commerce de détail, fabrication, restauration, culture, énergie, infrastructures, habitation, santé, information, éducation, etc.

En 150 ans, nous avons eu le temps de connaître les pièges à éviter. Dans certains secteurs bien connus, les coopératives et les mutuelles ont grandi à un point tel qu’elles se sont éloignées de leurs valeurs premières. Leur taille les a amenées à agir comme des entreprises capitalistes. Certaines le sont même devenues, confisquées par leurs membres présents, trahissant leurs membres passés et futurs, elles sont passées sous propriété privée. La création de la propriété est un vol.

La paix passe-t-elle par l’abandon de la propriété? Quand un bien n’a plus de propriétaire, à qui les voleurs peuvent-ils bien s’attaquer? Quand un bien ne peut être vendu, pourquoi les spéculateurs s’y intéresseraient-ils? Paradoxalement, la meilleure façon de protéger un patrimoine, c’est donc de cesser de le posséder et d’en confier l’administration à cette «démocratie de proximité» qu’est la coop.

Les coopératives d’habitation en sont un bon exemple: les membres ne peuvent vendre l’immeuble et se séparer le produit de la vente, car des générations de membres passés ont entretenu ce bien collectif pour qu’il soit utilisable par les générations de futurs membres. Le droit des membres est un droit d’utilisation, et on ne peut en priver les membres futurs. L’utilisation d’un bien, n’est-ce pas tout ce dont on a besoin? C’est le principe de toute coop: répondre à un besoin.

Selon la Confédération québécoise des coopératives d’habitation, il existe au Québec 1300 coops d’habitation, qui comptent plus de 30000 logements. Environ 60000 personnes vivent ainsi à l’abri de la spéculation et gèrent démocratiquement des actifs de 1,5 milliard $.

S’inspirant de ce principe, un nombre croissant de communautés poussent la logique encore plus loin en plaçant leurs terres, leurs maisons ou leurs infrastructures sous fiducie. Ces fiducies foncières, dont la gestion est souvent confiée à une coopérative, protègent la vocation du bien et prévoient les droits d’utilisation. D’autres formes d’autogestion apparaissent un peu partout dans le monde.

Petit à petit, la multiplication de ces initiatives crée, très concrètement, un monde sans propriétaires. Ce monde pourrait bien être aussi un monde sans violence, sans réfugiés et sans frontières.

Avr 022015
 

Il est tentant de réduire une coopérative à son aspect commercial. La coopérative est une entreprise, c’est vrai. Mais son caractère collectif est déterminant dans son identité et dans ses fondements. C’est ainsi qu’on ne finance pas une coopérative de la même manière qu’on finance une société à capital-actions. La finalité d’une compagnie, c’est de rapporter de l’argent aux investisseurs tandis que la finalité d’une coopérative, c’est de répondre à un besoin d’un groupe de personnes.

À la constitution d’une compagnie, les investisseurs placent leur argent ensemble et espèrent le faire fructifier par la croissance de la compagnie, par les dividendes qu’ils recevront à même les marges de profit dont bénéficiera l’entreprise avec les années. La coopérative, quant à elle, vise la rentabilité et la subsistance de l’entreprise, afin de répondre aux besoins de ses membres et de la communauté. Les surplus budgétaires que dégage une coopérative ont longtemps été désignés comme des trop-perçus, et non des profits. Cette désignation rappelle que les coopératives ne doivent pas chercher à faire de l’argent sur le dos de leurs membres, comme nous le rappelle l’article 128 de la Loi sur les coopératives. Ce sont ces excédents budgétaires qui feront alors l’objet de la ristourne, considérant que la coopérative avait des tarifs trop onéreux pour ses membres.

Aussi, les membres de la coopérative ne disposeront pas des biens de la coopérative. Le principe juridique des patrimoines distincts s’applique. Autrement dit, en cas de poursuite contre la coopérative, les membres ne peuvent généralement pas être tenus responsable des fautes de celle-ci, et vice-versa. Et en cas de liquidation, les biens de la coopérative n’iront jamais entre les mains des membres, mais devront plutôt demeurer au sein du mouvement coopératif.

Alors, quand on cherche du financement pour notre coopérative, il importe de comprendre ce qu’est le capital social de celle-ci. Nos parts sociales représentent notre apport à la coop; c’est ce qui nous reviendra à la fin de notre lien avec la coopérative et c’est le risque qu’une personne accepte de prendre en adhérant à la coopérative. En cas de faillite de la coop, les parts sociales disparaîtront et il faudra en faire son deuil. Quand on investit dans des parts privilégiées, on assume également un grand risque financier.

Toutefois, ce sont des moyens intéressants pour financer notre coopérative, car les parts privilégiées bénéficient d’une durée minimale de trois ans, pendant lesquels notre argent peut techniquement fructifier. Après les trois années, si la coopérative ne peut rembourser les parts privilégiées, les intérêts continuent de se cumuler au bénéfice du membre.

Il est à noter que les parts privilégiées sont généralement dispensées de la conception d’un prospectus aux investisseurs potentiels en vertu de la Loi sur les valeurs mobilières. Le prospectus est ce document détaillé qui explique pour quelles raisons une entreprise cherche du financement auprès du public.

En cette ère de socio-financement et d’austérité, les coopérants devront faire preuve d’imagination pour financer leurs projets, car les gouvernements se font de plus en plus pingres, même pour encourager l’innovation et la solidarité.

Mar 042015
 

Lancement d’album, shower de bébé, party d’initiation, enterrement de vie de jeunesse, collation des grades, mariage ou baptême… peu importe le visage que vous donnerez à l’événement fondateur de votre coopérative, il faut qu’il soit une célébration qui reste gravée dans la mémoire des membres. Votre plan d’affaires est béton, votre campagne d’engagement préconstitutif est un succès, vous êtes prêts à confier votre structure démocratique à une équipe du tonnerre pour répondre au besoin identifié. Dans le cadre de notre série Comment démarrer une coopérative?, voici quelques conseils pour l’assemblée générale d’organisation. C’est la première grand messe de votre coop. Faites sonner les cloches!

Il faut que l’Assemblée générale d’organisation (AGO) soit à l’image de votre coop. Êtes-vous dans le secteur gastronomique ou alimentaire? Régalez vos membres. Dans le secteur technologique? Faites le dévoilement d’un prototype. Dans l’artisanat ou l’art? Lancez une gamme ou faites le vernissage d’une exposition. Une coop d’habitation? Un BBQ. Ce ne sont que quelques exemples…

Donner le feu sacré

Parce qu’au-delà de la formalité administrative, dites-vous bien que ce qui motivera vos membres et vos premiers administrateurs à traverser les défis du démarrage pendant trois à cinq ans, c’est le sentiment d’appartenance à la coop. C’est un lien affectif qui ne s’écrit sur aucun formulaire, qui ne s’adopte pas avec une proposition, un appui et un vote. Mais ce lien d’amour est la base du ciment qui tiendra votre coop contre vents et marées.

Les aspects techniques sont importants, toutefois, et votre Coopérative de développement régional (CDR) saura vous guider à travers ceux-ci. Il faut faire les choses dans l’ordre. Mais sur cette base, vous pouvez ajouter des éléments qui vous semblent importants.

Même si la loi des coopératives ne demande pas que soient formellement adoptées certains aspects du projet en AGO (plan d’affaires, vision, stratégies, produits), il est intéressant de donner du temps et de l’espace à ces aspects pour que les membres prennent une part active, démocratiquement, non seulement à ce qui est juridique, mais également aux aspects pratiques du projets.

Créer une tradition démocratique

Votre AGO, c’est la mise en place de la tradition démocratique de la coopérative. Ainsi, chaque Assemblée générale annuelle (AGA) qui suivra sera inspirée de l’AGO. Si votre politique d’achats, votre politique éditoriale ou votre code d’éthique ont été adoptés par vos membres en AGO, ils s’attendront à ce que vous continuiez à les consulter sur ces aspects lors de chaque AGA ou même en continu.

Ce qui est trop souvent négligé par les coopératives, dans le feu de l’action des opérations et surtout pendant le démarrage, c’est le lien démocratique avec les membres. L’AGO est une occasion de mettre en place des structures simples où les membres peuvent participer au développement de la coop, et d’adopter des processus de consultation efficaces. C’est ce qui fera la différence entre votre coopérative et toute autre entreprise capitaliste.

Cet article conclut la première édition du Guide coop Ensemble. Mais il est à prévoir que d’autres s’ajouteront pour répondre aux questions qui nous sont fréquemment adressées. À bientôt!

Depuis la fondation du journal Ensemble, avec la publication de centaines d’articles spécialisés sur les coopératives et d’un livre sur l’Année internationale des coopératives en 2012, de nombreux groupes ont sollicité notre équipe pour avoir des conseils et de l’information en vue du démarrage de leur propre coop. Nous publions dans cette série d’articles un résumé des étapes que nous recommandons. Ces articles seront mis à jour à l’occasion.

Fév 202015
 

Il ne faut pas mettre la charrue devant les bœufs, c’est bien connu. Mais en démarrant une coopérative, on peut tout de même les mettre côte à côte. Un procédé méconnu permet en effet d’aller chercher son financement en même temps qu’on prépare la fondation officielle la coop. Ainsi, on démarre le projet si et seulement si le financement est au rendez-vous. Ce joker coop s’appelle l’engagement préconstitutif. Ne vous en privez pas! Dans le cadre de notre série Comment démarrer une coopérative?, voici comment procéder dans les règles de l’art.

Le principe de l’engagement préconstitutif est simple: c’est de vous permettre de recruter vos membres avant la fondation de la coopérative. En gros, les futurs membres signent un papier qui dit: «Ce projet répond à mes besoins, et je m’engage donc à verser, lors de l’assemblée générale d’organisation, le montant suivant à souscrire en parts sociales.» Évidemment, ce paiement est conditionnel à ce que la coop soit effectivement fondée. Les gens sont donc certains de ne pas perdre leur contribution.

Pour procéder, procurez-vous auprès de votre Coopérative de développement régional (CDR) un modèle de formulaire d’engagement préconstitutif, que vous adapterez à la réalité de votre projet. Munissez-vous d’une version attrayante de votre plan d’affaires que vous pourrez montrer aux futurs membres, sans nécessairement leur en laisser un exemplaire, ainsi que tout autre outil promotionnel (maquette, prototype de produit, etc.).

Ensuite, vous pouvez mener votre campagne d’engagement préconstitutif. Cette campagne peut être menée par chacun des membres de votre comité provisoire, ou nécessiter l’engagement d’un représentant ou d’une représentante aguerrie.

Une fois votre campagne complétée, compilez les résultats et conservez précieusement les formulaires d’engagement préconstitutif signés. Vous pouvez maintenant vous présenter aux autres bailleurs de fonds (organismes publics, institutions financières, etc.), armés de cette mise de fonds virtuelle, qui n’en est pas moins officielle. La somme des engagements préconstitutifs des membres constitue la «mise de fonds du promoteur», dans leur langage.

Les bailleurs de fonds pourront donc vous donner une confirmation de leur propre investissement dans votre projet, ce qui vous permettra à votre tour de confirmer aux membres que le projet de coop deviendra réalité, et de les convoquer à l’Assemblée générale d’organisation, soit la véritable fondation de la coop. Nous reviendrons sur cette étape ultime dans un prochain article.

À bientôt!

Depuis la fondation du journal Ensemble, avec la publication de centaines d’articles spécialisés sur les coopératives et d’un livre sur l’Année internationale des coopératives en 2012, de nombreux groupes ont sollicité notre équipe pour avoir des conseils et de l’information en vue du démarrage de leur propre coop. Nous publions dans cette série d’articles un résumé des étapes que nous recommandons. Ces articles seront mis à jour à l’occasion.

Fév 132015
 

Il est temps de mettre sur papier tout ce que vous avez en tête à propos de votre projet. Et ça, personne ne peut le faire à votre place. Les professionnels de la Coopérative de développement régional (CDR) pourront vous fournir des modèles et vous donner leur avis sur votre planification, mais c’est à vous de faire l’essentiel du travail. Voici tout de même, dans le cadre de notre série Comment démarrer une coopérative?, quelques perspectives qui sont propres aux coops et qui peuvent vous aider à aborder cette tâche d’un œil averti.

Voilà, vous avez votre modèle fourni par la CDR ou tout autre organisme d’aide au développement entrepreneurial de votre localité. Tout ce que vous avez longuement muri, il suffit de le trier et d’en placer chaque facette dans la bonne section, sachant que toutes les sections ne s’appliquent pas nécessairement à votre projet. Sans aller ici dans le détail, ces sections couvriront autant les opérations que la structure coopérative et les ressources humaines, ainsi que les assurances, normes, associations et lois à respecter, puis les inévitables prévisions budgétaires.

Cibler le besoin

Un élément central du plan d’affaires est l’étude de marché. Cette section sert souvent, pour les entreprises capitalistes, à expliquer comment on va «créer le besoin», et définir un marché cible à «conquérir». Dans le cas d’une coopérative, l’étude de marché est plutôt la définition d’un besoin existant. Il faut révéler ce besoin, lui permettre de s’exprimer. C’est là que la dimension démocratique de la coop prend sa racine.

Ce besoin, vous l’avez déjà identifié. Il faut maintenant le définir. Combien de personnes le vivent, à quelle fréquence, avec quelle acuité? La définition du besoin par l’étude de marché, c’est aussi ce qui va guider l’établissement de la tarification. Ici, l’entreprise capitaliste essaiera de déterminer «jusqu’à combien la clientèle ciblée est prête à payer». La coopérative, elle, tentera plutôt d’identifier le «juste prix» permettant de rémunérer efficacement le travail tout en favorisant l’accès au produit par le plus grand nombre de personnes.

L’adhésion du milieu

Une coop, c’est un projet collectif, qui s’intègre lui-même dans une collectivité. Si l’implantation d’une entreprise capitaliste est déterminée par la compétition, c’est plutôt la complémentarité qui est le fondement de l’intégration d’une coopérative au marché. Si la coop du village voisin répond au besoin, le but est atteint et il n’est nul besoin de l’absorber pour faire une plus grande coop. On s’en inspirera plutôt pour répondre au besoin de ce village-ci, et alors on tissera des liens de partenariat entre les deux coops.

Aussi, le plan d’affaires d’une coop doit-il faire la démonstration de l’adhésion du milieu dans lequel s’implantera la nouvelle entreprise. Une démarche de concertation autour du projet permettra d’ajouter en annexe des lettres d’appui d’organismes ou de personnes reconnus dans le secteur d’activité, ainsi que des lettres d’intention de partenariat d’autres coopératives qui œuvrent dans le même secteur ou dans des secteurs complémentaires.

Dans un prochain article, vous découvrirez aussi un outil permettant de révéler l’appui et l’engagement d’une large population à votre projet.

Équité pour les fondateurs

Démarrer une entreprise, c’est investir beaucoup de temps et d’énergie pendant cinq ans, au moins. Les fondateurs de coopératives ne font pas exception à cette règle et se donneront tout entiers pendant des années à leur projet. Pourtant, ils auront ni plus ni moins que les mêmes droits démocratiques que les membres qui adhéreront à la coop après que cette étape difficile ait été complétée. C’est le paradoxe soulevé par Bruno Blais, fondateur de la célèbre brasserie coop La Barberie, lors du forum coopératif de Québec au printemps 2012.

Si vous souhaitez prévoir plus d’équité entre les fondateurs et les futurs membres de votre coop, c’est à l’étape du plan d’affaires qu’il faut y penser.

À la Coopérative de journalisme indépendant, nous avons tenté d’inventer un système permettant de rétablir une équité pour les fondateurs, en utilisant les parts privilégiées, et nous l’avons inscrit dans le règlement de régie interne. Selon ce principe, tout le travail fait pour démarrer la coopérative est facturé par les membres, mais pendant la phase de démarrage, la partie des honoraires qui ne peut être versée en argent est souscrite par les membres en parts privilégiées du même montant dans la coopérative. Cela veut dire qu’ils détiennent un actif dans la coopérative qui sera remboursable au plus tôt trois ans après, et à la condition que les finances de la coopérative le permettent (article 38 de la loi). Cela permet de reconnaître leur investissement et de leur rendre à long terme, même s’ils ont quitté la coopérative.

Ce n’est pas un système parfait, car dans une coopérative à but non lucratif les parts privilégiées ne portent pas intérêt. D’autre part, il est difficile de quantifier tous les efforts investis, et nous devons reconnaître que ce qui a été souscrit en parts privilégiées n’en représente qu’une petite partie. En effet, ces valeurs restent taxables et imposables, et lorsqu’il s’est agi de gros montants, les membres n’ont pas voulu payer des impôts sur des sommes qu’ils ne toucheront pas tout de suite, tandis que la trésorerie de la coopérative ne pouvait se permettre d’assumer même les taxes sur ces montants. Enfin, notre secteur d’activité génère si peu de revenus que nous n’avons pas encore pu commencer à rembourser les parts (vous pouvez nous aider en contribuant!).

Malgré ces inconvénients, nous pensons qu’il faut étudier cette avenue et qu’éventuellement la Loi des coopératives pourrait prévoir un système d’équité semblable dans l’avenir.

À bientôt!

Depuis la fondation du journal Ensemble, avec la publication de centaines d’articles spécialisés sur les coopératives et d’un livre sur l’Année internationale des coopératives en 2012, de nombreux groupes ont sollicité notre équipe pour avoir des conseils et de l’information en vue du démarrage de leur propre coop. Nous publions dans cette série d’articles un résumé des étapes que nous recommandons. Ces articles seront mis à jour à l’occasion.

Fév 062015
 

Parions que déjà, on a tenté de vous décourager de votre projet de coop, à grands coups d’exemples de coops qui ont raté leur coup: structure trop lourde, bisbille dans l’équipe, détournements, fraude. Les histoires d’horreur existent malheureusement dans le monde coop comme dans celui des entreprises capitalistes. La différence, c’est qu’il est possible de donner à une coop une solide structure démocratique qui permette d’éviter ces dérives. Voici, dans ce second article de la série Comment démarrer une coopérative?, quelques erreurs à éviter pour mettre votre coop à l’abri!

Dans l’enthousiasme de mettre au monde leur bébé entreprise, les fondatrices et fondateurs négligent parfois de porter l’attention nécessaire à l’élaboration de leur structure démocratique. C’est fastidieux, c’est technique, mais c’est pourtant essentiel. À qui donne-t-on le pouvoir de décider? Aux clients, aux travailleurs, aux producteurs, aux habitants du village? Peut-on faire cohabiter des intérêts différents les uns des autres?

On ne peut pas ouvrir la porte à tout le monde sous prétexte que c’est un projet collectif et fondé sur de bonnes intentions. Les structures, les lois et les règlements, ce n’est pas fait pour servir quand tout va bien. Les règles sont faites pour les pires moments: quand les conflits émergent, quand les intérêts contraires à celui de la coop se pointent le nez. Quand on se marie, on signe souvent sans regarder. Mais lors du divorce, on est content qu’il y ait des lois qui régissent une telle situation dans le Code civil.

Le pouvoir au lien d’usage le plus fort

Dans une entreprise capitaliste, le pouvoir va automatiquement aux personnes qui ont investi le plus d’argent, peu importe l’importance que l’entreprise représente pour eux. Dans un organisme à but non lucratif (OBNL), le pouvoir va à un conseil d’administration (CA) issu de la communauté, en espérant que ces personnes se sentent assez concernées. Dans une coop, vous avez la chance de donner le pouvoir décisionnel, celui de participer au CA, à la ou aux catégories de membres de votre choix. C’est là un choix décisif!

Il faut identifier le groupe d’intérêt qui formera la catégorie de membres pour qui la coop est très importante. Ce sont les personnes dont la coop répond à un besoin primaire, autant que possible. C’est ce qu’on appelle le «lien d’usage». Se loger, c’est un besoin primaire, travailler aussi. Ce sont des liens d’usage forts. Le membre travailleur, pour qui la coop représente son gagne-pain, risque beaucoup moins de prendre des décisions nuisibles à la coop que le client pour qui la coop signifie prendre un café de temps en temps (un lien d’usage très faible).

Selon votre projet, il s’agit d’identifier le lien d’usage le plus fort. Est-ce celui des producteurs qui dépendront de la coop pour la mise en marché efficace et équitable de leurs produits? Est-ce celui des consommateurs qui pourront se nourrir de produits sains et équitables à prix avantageux? Est-ce celui des travailleurs qui y gagneront leur vie? Selon votre réponse, vous choisirez une coop de producteurs, une coop de consommateurs ou une coop de travailleurs.

Par exemple, la Coopérative de journalisme indépendant, éditeur du journal Ensemble, est une coop de producteurs formée par les journalistes pigistes. Pour adhérer, ceux-ci doivent respecter de sévères critères d’indépendance. Ce choix permet de s’assurer que l’enjeu sensible de l’information reste protégé des pressions qui pourraient être exercées par les clients publicitaires, ou même par les lecteurs. Objectivement, le journal Ensemble est moins essentiel pour ces deux groupes d’intérêt que pour les journalistes qui y travaillent à la pige.

Coop de solidarité

La coopérative de solidarité est un autre modèle très en vogue depuis son apparition au tournant du millénaire. Cette structure permet de faire cohabiter plusieurs catégories de membres dans une même coop. Ce faisant, elle ouvre la porte à des conflits d’intérêts qu’il est essentiel d’éviter.

Deux catégories de membres peuvent avoir des intérêts divergents, et c’est très légitime. Par exemple, les producteurs veulent avoir le meilleur prix pour leur produit, et les consommateurs exigent au contraire de payer le moins possible.

Dans ce cas, il est très important de choisir une catégorie de membres principale, et même d’exclure certaines catégories. Dans une coop de solidarité à «dominante consommateurs», par exemple, on pourra très bien choisir d’exclure les producteurs et de limiter le nombre de sièges des membres travailleurs au CA. Dans une coop de solidarité à «prédominance travailleurs», on limitera les producteurs à un siège au CA et on exclura les consommateurs. Si l’on garde toutes ces catégories, il faut s’assurer qu’une d’entre elles détienne le plus grand nombre de sièges au CA.

Une coop de solidarité doit aussi accorder au moins un siège du CA, et au maximum un tiers de ces sièges, à une nouvelle catégorie de membres, appelée «membres de soutien». Si le lien d’usage d’un groupe d’intérêt est trop faible mais qu’on souhaite tout de même la voir représentée au CA, on peut lui donner ce statut de membre de soutien. Par exemple, les lecteurs du journal local coopératif, dont on souhaite la participation à la coop même s’ils n’ont pas de lien d’usage financier, peuvent se voir confier le rôle de membres de soutien.

Comme le veut l’adage, «le diable est dans les détails», et si vous voulez que votre coop prospère contre les vents et les marées qui ne manqueront pas de battre sa coque, il faut que celle-ci soit solide. Ce texte avait pour mission de vous confier certains principes de base pour guider la construction de votre structure coop. Il vous faudra maintenant la traduire sur papier dans le règlement de régie interne, avec l’aide de votre Coopérative de développement régional (CDR), dont voici la liste. La semaine prochaine, nous aborderons le plan d’affaires, qui est l’ADN de votre projet.

À bientôt!

Depuis la fondation du journal Ensemble, avec la publication de centaines d’articles spécialisés sur les coopératives et d’un livre sur l’Année internationale des coopératives en 2012, de nombreux groupes ont sollicité notre équipe pour avoir des conseils et de l’information en vue du démarrage de leur propre coop. Nous publions dans cette série d’articles un résumé des étapes que nous recommandons. Ces articles seront mis à jour à l’occasion.

Jan 302015
 

Une idée géniale et de belles valeurs, est-ce tout ce qu’il vous faut pour démarrer une entreprise coopérative? Il suffit ensuite de choisir un marché prometteur où implanter l’entreprise, de convaincre les gens que c’est une idée géniale, puis de trouver quelques personnes pour former le CA et enfin d’aller chercher du financement… STOP! Non, ça ne fonctionne pas ainsi. Une coop, c’est une démocratie. Ça commence par un besoin collectif exprimé par des personnes de la communauté. Ensuite, on peut réunir ces personnes et établir un plan pour répondre à ce besoin. Dans le cadre de notre série Comment démarrer une coopérative?, quelques conseils pour démarrer du bon pied, au pluriel!

L’économie capitaliste dans laquelle nous vivons nous a habitué à penser qu’on démarre une entreprise pour faire de l’argent, pour la faire prospérer et ensuite la revendre à un bon prix. Qu’on soit un actionnaire qui surfe sur les titres de Google et de Monsanto, ou un honnête propriétaire dont l’entreprise est le seul fond de retraite, la finalité reste le profit. Mais pour la coopérative, le but est tout autre: c’est de répondre à un besoin.

Votre besoin est-il un besoin primaire? C’est un bon départ. Les besoins primaires sont ceux qui créent les liens d’usage les plus solides dans une coop. Se nourrir, se loger, travailler, avoir accès à l’eau potable… quel est le besoin? Souvent, c’est un besoin auquel ni l’entreprise privée ni l’État ne répondent dans votre région. Pénurie de médecins? Créez une coop de santé. Aucun investisseur privé n’est intéressé à racheter l’épicerie ou le dépanneur du coin? Formez une coop de services de proximité. Le propriétaire de votre shop prend sa retraite et n’a pas de relève? Proposez à vos collègues de sauver vos emplois en mettant sur pied une coop de travailleurs ou une CTA.

Si votre point de départ est une idée géniale, innovatrice, cherchez le besoin qui est derrière cette idée et les personnes qui partagent ce besoin. C’est ainsi que sont nés les espaces de travail partagé: un travailleur autonome s’est dit que «ça serait donc plus cool d’aller travailler dans un endroit agréable tous les matins avec des collègues plutôt que tout seul dans mon demi sous-sol». D’autres pigistes avaient le même besoin. Ils se sont regroupés en coop et des Ecto, des Créagora et des Noburo sont nés un peu partout.

Les personnes qui partagent le besoin: voici le groupe. Ce sont les personnes qui ont un fort intérêt à ce que la coop soit créée et qu’elle fonctionne. Ce sont les citoyens de la coop. On les appelle les membres. Si la coop regroupe plusieurs catégories de membres qui ont des besoins et intérêts différents, il faut identifier parmi ceux-ci celui qui est le plus important, mais nous y reviendrons dans le deuxième article.

Parce que pour tout projet, le facteur individuel est très important, il faut bien choisir les premiers membres. Ils seront les racines de la coop. Il faut qu’ils soient capables de relever des défis ensemble. C’est peut-être là que la coop ressemble le plus à toute autre entreprise: il faut que l’équipe de base soit prête à aller à la guerre ensemble (j’exagère à peine), prête à encaisser les coups les plus durs, prête à partager les sacrifices qui sont le lot de tout entrepreneur. Bref, il faut que cette équipe de base soit plus solide… qu’un couple!

Ces personnes, on les réunit pour bien comprendre le besoin, dans un contexte cordial (un apéro, un bon repas ou une journée de plein air, parce qu’il faut tout de même que ce soit agréable!). Si le besoin justifie qu’on crée un projet d’entreprise pour y répondre, on forme un comité provisoire et on fait appel à des ressources spécialisées pour accompagner la démarche. Dans toutes les régions du Québec et en Acadie, il existe des Coopératives de développement régional (CDR). Elles sont la porte d’entrée pour tout projet de coop. Pour quelques centaines de dollars, elles vous accompagneront efficacement jusqu’aux premières années d’opération de l’entreprise, et resteront toujours à vos côtés ensuite.

La première chose que la CDR vous aidera à produire, c’est un plan d’affaires. Ce plan ne sera crédible et efficace que s’il est fondé sur un besoin réel et porté par un groupe motivé. Dans un prochain article, nous verrons quelles sont les principales erreurs à éviter dans la construction de votre démocratie coopérative.

À bientôt!

Depuis la fondation du journal Ensemble, avec la publication de centaines d’articles spécialisés sur les coopératives et d’un livre sur l’Année internationale des coopératives en 2012, de nombreux groupes ont sollicité notre équipe pour avoir des conseils et de l’information en vue du démarrage de leur propre coop. Nous publions dans cette série d’articles un résumé des étapes que nous recommandons. Ces articles seront mis à jour à l’occasion.

Déc 192014
 

Vous avez un projet et vous souhaitez le réaliser de façon démocratique, égalitaire, équitable, structurée, officielle? Depuis la fondation du journal Ensemble, avec la publication de centaines d’articles spécialisés sur les coopératives et d’un livre sur l’Année internationale des coopératives en 2012, de nombreux groupes ont sollicité notre équipe pour avoir des conseils et de l’information en vue du démarrage de leur propre coop. Nous publions ici un résumé des étapes que nous recommandons. Cet article sera mis à jour à l’occasion. Gardez-le dans vos signets!

Depuis plusieurs années, le désengagement de l’État dans les services publics pousse les populations à s’organiser pour répondre à leurs besoins, notamment en créant des coopératives. En même temps, les gouvernements n’ont cessé de couper également dans les ressources d’accompagnement au développement de l’économie sociale.

Voici donc une nouvelle série d’articles que nous développons, en complémentarité avec les ressources existantes, pour aider les groupes à démarrer leur coop sur le bon pied. Pour aider la publication de ces articles, soutenez le dossier Coopératisme!

  1. Un besoin, un groupe, un plan
  2. Structure démocratique: erreurs à éviter
  3. Le plan d’affaires: ADN de votre coop
  4. Mettre la charrue à côté des bœufs
  5. À GO: on démarre enfin!

Cette série d’articles est publiée chaque semaine à partir de janvier 2015, puis maintenue à jour et améliorée avec le temps, et peut donc être l’objet de modifications après publication.

Fondé par des coopératistes aguerris, le journal Ensemble est considéré comme une référence d’information sur les coopératives depuis ses premières publications en 2010 et la fondation de la Coopérative de journalisme indépendant en 2011.